jeudi 28 octobre 2010

Matinée Gallimard & Gallmeister

Travailler dans le monde du livre a de bons côtés (il y en a aussi de moins bons mais évitons de parler d'argent, c'est vulgaire...)

Ce mardi 26 octobre j'étais invité à un petit-déjeuner Gallimard & Gallmeister.

Une collation était aimablement offerte. J'ai courageusement ignoré les croissants (petite victoire personnelle) et me suis contenté de quelques litres de café.

Rolf Puls, directeur de Gallimard au Québec, animait une entrevue avec Oliver Gallmeister (des éditions du même nom) et Jean Mattern, responsable de la collection Du monde entier chez Gallimard.

La causerie a duré près de deux heures, je me contente ici d'un très court résumé. L'ensemble était passionnant, c'était un aperçu enrichissant de la dure (?) vie d'éditeur.

Chacun a tout d'abord résumé son parcours. Jean Mattern a suivi des études littéraires, a travaillé chez Actes Sud avant d'entrer chez Gallimard il y a douze ans. Éditer des bouquins est un choix de carrière qui remonte à loin. Il a récemment exploré le côté lumineux de la Force en publiant deux livres chez Sabine Wespieser: Les bains de Kiraly et De lait et de miel.

Oliver Gallmeister, même s'il se passionne depuis longtemps pour la littérature américaine, a eu une carrière toute différente (la gestion) avant de se lancer dans l'édition en 2005 (premier bouquin publié au tout début de 2006).

Du monde entier, c'est environ 30 à 35 titres par an (une nette diminution par rapport au passé). Gallmeister, dans les 9-10. Ce n'est pas une petite différence! Les deux éditeurs donnent le même conseil à ceux qui seraient tentés par l'aventure de l'édition: viser une niche étroite et s'y tenir; ne pas s'éparpiller, ne pas essayer de couvrir une trop large palette de genres. Gallmeister est un très bon exemple de cette méthode. La maison a une spécialité: la littérature de l'Ouest américain, le "nature writing" contemporain. Une partie du catalogue est consacrée au roman noir version "grands espaces" (avec notamment Craig Johnson, qui semble avoir eu beaucoup de succès dans les salons du livre en France). Une collection format poche (Totem) a été lancée il n'y a pas longtemps.

Autre thème abordé, la traduction. Pour les éditions Gallmeister il n'y a qu'une seule langue d'origine: l'anglais américain. Oliver Gallmeister peut donc intervenir à toutes les étapes du processus, depuis le choix des textes jusqu'à la traduction (qu'il n'effectue pas lui-même mais qu'il supervise apparemment de très près).

Du monde entier
se donne par contre pour mission d'offrir des traductions... du monde entier! La maîtrise de l'allemand (et je crois du néerlandais) permet à Jean Mattern de suivre de près ce qui se passe outre-Rhin (et par ricochet ce qui se publie en Scandinavie, les traductions en allemand étant fréquentes). Mais quid des auteurs lituaniens, slovaques, israéliens, russes ou turcs? Ici entrent en scène les lecteurs de Gallimard (ah, le beau métier). Une soixantaine de personnes (si je me souviens bien) sont chargées de lire les textes dans la langue originale puis de rédiger des rapports de lecture qui aideront l'éditeur dans le processus de choix. Autre source d'information, les institutions culturelles des pays concernés, qui effectuent parfois (à leurs frais puisque cela fait partie de leur mandat de diffusion des cultures nationales) une traduction partielle des textes et les transmettent aux éditeurs français.

Il a bien sûr été question des auteurs "maisons" et de la relation auteur/éditeur. Les deux invités ont loué le professionnalisme des auteurs anglo-saxons. Dans certains cas le rapport entre auteur et éditeur ne va pas au-delà du strict nécessaire (et les contacts se font souvent par l'intermédiaire des agents littéraires), mais les échanges peuvent parfois devenir très chaleureux. Les deux éditeurs ont rappelé que leur cas est un peu particulier puisque leurs auteurs sont tous déjà publiés dans leurs pays et langues d'origine. Il peut toutefois arriver que la traduction française ait plus de succès que l'édition originale (sauf erreur de ma part c'est le cas d'Ellroy, publié en français chez Rivages).

* * *

Dommage que l'entrevue n'ait pas été filmée, cela aurait permis d'en faire profiter plus de monde! Cette instructive matinée m'a donné le goût de découvrir ce fameux "nature writing"... affaire à suivre...

Un grand merci à Anne pour avoir pensé à me faire une petite place! ;-)

13 commentaires:

bladelor a dit…

J'aime bien ta victoire personnelle ! (oui, je sais, mon commentaire est très intéressant !)

Paul Arre a dit…

Mais bien au contraire, merci pour cet encouragement! Les petits croissants et chocolatines avaient l'air délicieux, ça n'a pas été facile...

Paul Arre a dit…

Parlant de gourmandises... il est amusant ton swap de Noël ;-)

Mic a dit…

Bonjour Paul,

Effectivement la petite maison d'édition Gallmeister s'est fait largement connaître en France avec un roman américain signé David Vann "Sukkwan Island" paru dans la collection Nature Writing. Un très beau texte, fort, poignant, que les hommes ont beaucoup aimé lire... Le thème étant la rencontre, puis le face à face d'un père avec son fils dans une nature hostile l'Alaska. Et cette fameuse page 113 où le roman bascule dans un nouveau souffle, mais chut !!! maintenant je me tais ... A bientôt, amitiés, MIC.

Emeraude a dit…

un petit déj gallimard gallmeister ??? Tu en as de la chance !! je crois que je n'aurai raté ça pour rien au monde ! (et je ne m'empêcherais pas de manger les croissants ;-))

Paul Arre a dit…

Mic: Sukkwan Island me tente en effet beaucoup!

Émeraude: je te comprends, c'est super bon ces petites choses sucrées... ;-)

cynic63 a dit…

J'ai détesté Sukkwan Island (à chaque fois qu'on en parle, ça me fait bondir!) mais ceci étant, je trouve qu'avoir un tel succès dans sa collection permet de publier beaucoup d'autres choses et de continuer un excellent travail, au demeurant, de découvreur ou de passeur. Comme le fait Gallmeister qui est, il est vrai, quelqu'un de passionné et de très abordable.
Intéressant ton passage sur la traduction et sur la recherche des romans à traduire pour les lecteurs francophones

cédric a dit…

Bonjour Paul
oui il y a "sukkwan island" de très bien mauis aussi les trois polars de G. Tapply si tu a envie d'un petit meurtre dans le monde des rivières américaines et des pecheurs à la mouche

Paul Arre a dit…

Vos deux commentaires résument bien ce que j'ai entendu sur Sukkwan Island: une majorité aime beaucoup, les autres détestent. J'avoue que ça m'intrigue!

Anonyme a dit…

Je commence à être très curieuse. Où dans le monde du livre? On pourrait s'y croiser :-) Malheureusement, je n'ai pas pu assister à la rencontre, il en faut qui garde les librairies pendant que d'autres ne mangent pas de croissants. Merci pour le compte-rendu, ça avait l'air vraiment intéressant. J'ai quand même eu la chance de discuter avec Oliver Gallmeister quand il est passé en librairie et c'est effectivement quelqu'un de très sympathique en plus du fait qu'il parle de son métier avec passion.

Paul Arre a dit…

:-pp C'est un blog perso et résolument amateur, j'évite d'y parler boulot sauf dans des occasions comme celle-ci (ça me sert d'aide-mémoire!)

Gallmeister a en effet l'air très enthousiaste.
J'aurais pu les écouter bavarder pendant une bonne heure supplémentaire (mais dans ce cas j'aurais réclamé des croissants)

Lystig a dit…

c'est aussi le cas de Sukkwan Island : qui a euy plus de succès en France... et ensuite s'est fait connaître aux Etats-Unis !

Mic a dit…

Bonjour Paul,

"Sukkwan Island" de David Vann éditions Gallmeister, vient de recevoir LE PRIX MEDICIS DU MEILLEUR ROMAN ETRANGER 2010. Seul grand prix littéraire français à couronner un livre étranger, c'est tout, sauf une surprise! Tant les lectrices et lecteurs avaient plébiscité ce roman, lors de sa sortie. Une juste récompense pour un roman littéraire de très grande qualité. Amitiés, MIC.