Ce mardi 26 octobre j'étais invité à un petit-déjeuner Gallimard & Gallmeister.
Une collation était aimablement offerte. J'ai courageusement ignoré les croissants (petite victoire personnelle) et me suis contenté de quelques litres de café.
Rolf Puls, directeur de Gallimard au Québec, animait une entrevue avec Oliver Gallmeister (des éditions du même nom) et Jean Mattern, responsable de la collection Du monde entier chez Gallimard.
La causerie a duré près de deux heures, je me contente ici d'un très court résumé. L'ensemble était passionnant, c'était un aperçu enrichissant de la dure (?) vie d'éditeur.
Chacun a tout d'abord résumé son parcours. Jean Mattern a suivi des études littéraires, a travaillé chez Actes Sud avant d'entrer chez Gallimard il y a douze ans. Éditer des bouquins est un choix de carrière qui remonte à loin. Il a récemment exploré le côté lumineux de la Force en publiant deux livres chez Sabine Wespieser: Les bains de Kiraly et De lait et de miel.
Oliver Gallmeister, même s'il se passionne depuis longtemps pour la littérature américaine, a eu une carrière toute différente (la gestion) avant de se lancer dans l'édition en 2005 (premier bouquin publié au tout début de 2006).
Du monde entier, c'est environ 30 à 35 titres par an (une nette diminution par rapport au passé). Gallmeister, dans les 9-10. Ce n'est pas une petite différence! Les deux éditeurs donnent le même conseil à ceux qui seraient tentés par l'aventure de l'édition: viser une niche étroite et s'y tenir; ne pas s'éparpiller, ne pas essayer de couvrir une trop large palette de genres. Gallmeister est un très bon exemple de cette méthode. La maison a une spécialité: la littérature de l'Ouest américain, le "nature writing" contemporain. Une partie du catalogue est consacrée au roman noir version "grands espaces" (avec notamment Craig Johnson, qui semble avoir eu beaucoup de succès dans les salons du livre en France). Une collection format poche (Totem) a été lancée il n'y a pas longtemps.
Autre thème abordé, la traduction. Pour les éditions Gallmeister il n'y a qu'une seule langue d'origine: l'anglais américain. Oliver Gallmeister peut donc intervenir à toutes les étapes du processus, depuis le choix des textes jusqu'à la traduction (qu'il n'effectue pas lui-même mais qu'il supervise apparemment de très près).
Du monde entier se donne par contre pour mission d'offrir des traductions... du monde entier! La maîtrise de l'allemand (et je crois du néerlandais) permet à Jean Mattern de suivre de près ce qui se passe outre-Rhin (et par ricochet ce qui se publie en Scandinavie, les traductions en allemand étant fréquentes). Mais quid des auteurs lituaniens, slovaques, israéliens, russes ou turcs? Ici entrent en scène les lecteurs de Gallimard (ah, le beau métier). Une soixantaine de personnes (si je me souviens bien) sont chargées de lire les textes dans la langue originale puis de rédiger des rapports de lecture qui aideront l'éditeur dans le processus de choix. Autre source d'information, les institutions culturelles des pays concernés, qui effectuent parfois (à leurs frais puisque cela fait partie de leur mandat de diffusion des cultures nationales) une traduction partielle des textes et les transmettent aux éditeurs français.
Il a bien sûr été question des auteurs "maisons" et de la relation auteur/éditeur. Les deux invités ont loué le professionnalisme des auteurs anglo-saxons. Dans certains cas le rapport entre auteur et éditeur ne va pas au-delà du strict nécessaire (et les contacts se font souvent par l'intermédiaire des agents littéraires), mais les échanges peuvent parfois devenir très chaleureux. Les deux éditeurs ont rappelé que leur cas est un peu particulier puisque leurs auteurs sont tous déjà publiés dans leurs pays et langues d'origine. Il peut toutefois arriver que la traduction française ait plus de succès que l'édition originale (sauf erreur de ma part c'est le cas d'Ellroy, publié en français chez Rivages).
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Dommage que l'entrevue n'ait pas été filmée, cela aurait permis d'en faire profiter plus de monde! Cette instructive matinée m'a donné le goût de découvrir ce fameux "nature writing"... affaire à suivre...
Un grand merci à Anne pour avoir pensé à me faire une petite place! ;-)