Un torse dans les rochers (titre original Tatuerad torso), Helene Tursten, Éd. Michel Lafon 2008, 414 pages. Traduit du suédois par Hélène Hervieu.
Les polars d'Helene Tursten ont inspiré plusieurs téléfilms en Suède. La bande-annonce de Tatuerad torso est visible sur ce site.
En suédois, ce roman est le troisième d'une série policière qui à ce jour en compte huit (voir le récapitulatif de la série Irene Huss). Mais c'est le premier traduit en français. Michel Lafon a décidé de faire l'impasse sur les deux premiers titres. Tant pis pour les lecteurs.
L'action de la série se déroule essentiellement à Göteborg, ville chère à mon cœur. L'abondance de photos sur le Net permet de mieux se plonger dans l'ambiance (cela vaut aussi pour les polars d'Åke Edwardson). Göteborg se donne des petits airs néerlandais avec ses canaux; on peut y visiter de nombreuses églises dont la Hagakyrkan (où j'allais parfois écouter les organistes durant leurs répétitions); le Poséidon de Carl Milles contemple Avenyn, l'artère centrale; voici le bâtiment le plus laid de la ville; l'étonnante Feskekörkan a des allures de cathédrale, mais c'est un marché couvert où l'on trouve tout ce qu'il faut pour préparer une Janssons frestelse; la Saluhallen est un autre marché couvert, plus central; le réseau de tramways dessert l'agglomération, en combinaison avec les bus; quelques vieux trams sont amoureusement conservés pour le plus grand plaisir des touristes; Göteborg est située à l'embouchure du Göta älv, la mer est toute proche et les bateaux ne manquent pas; enfin le vaste Slottskogen, un parc public qui propose des pelouses pour bronzer ou jouer, des bois où l'on peut presque se perdre, et même un petit zoo champêtre pour les plus jeunes.
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Courte présentation des 75 premières pages
Courte présentation des 75 premières pages
Le titre du bouquin résume bien le point de départ de l'histoire. Au cours d'une promenade matinale sur la côte suédoise juste au sud de Göteborg, un chien découvre un sac-poubelle entre des rochers. Le sac contient un torse humain auquel il manque quelques muscles et organes. Un tatouage au motif très caractéristique est encore visible et permettra peut-être d'identifier la victime.
Irene Huss est mère de famille et inspectrice au sein de la police criminelle sous la direction de Sven Andersson. Le commissaire lance son équipe sur les traces de la victime et de son assassin. Premiers objectifs: faire autopsier le torse et comparer les résultats avec la liste des disparitions récentes, chercher d'autres sacs qui auraient pu s'échouer le long de la côte, retrouver l'artiste qui a réalisé le tatouage.
L'enquête s'avère complexe et entraîne Huss jusqu'à Copenhague, où un crime très semblable a été commis moins de deux ans auparavant. Irene va servir d'agent de liaison entre la police danoise et ses collègues de Göteborg. La piste du tatouage l'amène dans les quartiers chauds de la capitale du Danemark, à la recherche d'indices, d'un lien entre les deux victimes, de témoignages. Huss va faire la rencontre de Tom Tanaka, un personnage étonnant, ancien sumo japonais, propriétaire d'une boutique "hot" destinée à une clientèle gay. L'enseigne de sa boutique est identique au tatouage du torse retrouvé en Suède...
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Bon appétit!
Bon appétit!
Ce polar est très prenant mais attention, certains passages sont gore. Tursten -jadis infirmière puis dentiste- taille impitoyablement dans la bidoche.
Cela n'indispose pas trop les enquêteurs, qui vomissent peu mais pâlissent souvent. Très professionnels, ils peuvent sans sourciller visionner deux vidéos peu ragoûtantes puis aller déjeuner parce qu'il est déjà 14 heures et qu'il est hors de question de sauter un repas. Au menu, "une bière light et du pain sortant du four" puis un "dos de cabillaud grillé avec des légumes sautés au wok, le tout accompagné d'une sauce au vin blanc". Pas d'entrées ni de desserts, le visionnement des preuves leur ayant un peu coupé l'appétit! Ensuite retour au bureau pour revoir les vidéos. Comme le dit une des filles de l'inspectrice, "tu as vraiment un boulot merdique, maman".
Polar suédois oblige, les héros boivent du café à tout instant de la journée: au commissariat, à la maison, chez les témoins, sur le ferry, à l'hôtel (les voitures ne sont pas équipées de cafetières mais je m'étonne que Volvo n'y ait pas encore pensé). J'ai toutefois été surpris par la fréquence des repas pris au restaurant. Je me demandais, en ouvrant le bouquin, pourquoi l'auteur avait pris soin d'indiquer en exergue que "ce livre ne peut en aucun cas servir de guide touristique". Après le troisième gueuleton, j'ai compris.
En prime le mari d'Irene Huss est cuisinier dans un grand restaurant de Göteborg ("une étoile au guide Michelin") si bien que la bouffe est un thème important de la vie familiale. Et si Jenny -une des filles du couple Huss- est végétarienne, ce n'est pas le cas des autres membres de la famille qui se régalent volontiers d'un bon steak saignant. Miam.
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Petite touche féminine. Bien que très concentrée sur sa mission, Irene Huss commente volontiers la décoration, la saveur des mets, la façon de s'habiller des gens qu'elle rencontre... et la musculature d'un certain collègue danois (on ne peut pas lui reprocher d'être observatrice, c'est une qualité importante dans sa profession). Cela fait un agréable contraste avec les scènes plus dures.
Un torse dans les rochers est un bon polar avec une intrigue captivante, malgré quelques passages très macabres. Les personnages sont vivants, les situations crédibles (sauf peut-être lorsque la médecin légiste s'improvise psychiatre). Je ne vais pas jusqu'à en faire un coup de cœur mais j'ai très envie de lire d'autres aventures d'Irene Huss. Ça tombe bien car un deuxième roman d'Helene Tursten sera très bientôt disponible au Québec: Le Diable de verre.
Je suis prêt pour le second service.
9 commentaires:
je viens de regarder la vidéo (en buvant mon café !) : est-ce que cette série, c'est autre chose qu'une intrigue à l'américaine sauce suédoise. Je veux dire, est-ce que c'est original, est-ce que ça peut plaire à ceux qui n'ont pas d'intérêt particulier pour Goteborg ?
Et l'attitude de l'éditeur qui fait l'impasse sur les premiers tomes, ça a le don de m'agacer...
C'est un roman policier qui ne me fait guère penser aux flics américains tels qu'on peut les voir dans les œuvres de fiction (ou parfois au journal télévisé...)
Pas de course poursuite, pas de fusillade entre les gangsters et des flics armés jusqu'aux dents. Ne cherchez pas Dirty Harry ou Bruce Willis chez Tursten, par contre "le méchant" ressemble à ce qu'on peut voir dans des thrillers américains. Mais bon, les pervers criminels ne sont pas -hélas- l'apanage des USA.
Est-ce très original? Non. On est assez loin d'Indridason, très loin de Theorin, bien plus proche d'Arne Dahl ou peut-être Minette Walters. Et il n'est absolument pas nécessaire d'aimer Göteborg pour apprécier ;-)
J'ai apprécié les photos de Göteborg et la bande-annonce aussi !
C'est vrai que dans Millénium aussi, ils buvaient TOUT-le-temps du café !
Merci pour ce billet en tout cas !
Göteborg est une ville sympa, très moche en panorama (c'est un port, avec chantier naval) mais très agréable pour se ballader, boire du café, se gaver de kanelbullar, siroter un café, etc.
Suis plutôt thé pour ma part. Peut-être l'influence d'Agatha Christie dans mon jeune âge!
PS: j'ai essayé de laisser un commentaire sous ton billet "Out" mais ça n'a pas marché.
Ah bon ! Je vais tenter de trouver ce qui cloche ...
Pour ce qui est de Goteberg, j'ai l'impression que pour ce genre de série, une petite ville pas trop touristique fait peut-être mieux l'affaire.
Pour le commentaire, je crois qu'il faut cliquer sur aperçu, puis ensuite, lorsque l'aperçu est présenté, cliquer sur laisser un commentaire.
C'est compliqué hein !
ça marche... j'avais bloqué les cookies tiers, résultat ça coinçait sans dire pourquoi.
Excellente critique qui m'a décidée à franchir le pas et je n'ai pas été déçue, j'ai adoré !
Tout comme toi j'ai remarqué que les suédois buvaient du café à longueur de journée et ne sautaient un repas sous aucun prétexte !
Bien le bonjour Sophie!
Je vois en lisant ton billet que tu ne détestes pas le gore ;-) C'est vrai que ça aide pour lire le Tursten!
Lien direct vers le billet de Sophie.
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